Toutes les femmes qui ont des enfants pourront l’affirmer : être mère est un état en perpétuelle mutation. Il y a une manière d’être qui précède la maternité et une manière d’être qui suit la maternité. L’insouciance, la liberté; l’inquiétude, la culpabilité. La force aussi, et l’amour, inconditionnel.
Je suis devenue mère à l’âge de 26 ans sans l’avoir planifié. Je voulais des enfants, mais pas à ce moment. Pour moi, l’apprentissage de la maternité n’est pas simple. Je me sens si souvent dépassée, envahie, écrasée. Insuffisante. Ma mère, elle, n’a jamais semblé avoir de limites. Est-ce normal que j’en aie?
Ma mère a eu quatre enfants tout en menant une brillante carrière de médecin. En plus des siens, elle a mis au monde des centaines d’enfants. Quand j’étais petite et qu’elle me manquait, je me disais que ma maman donnait la vie. J’avais toujours l’impression que les femmes accouchaient le soir, la nuit, lors d’un anniversaire, à Noël… Je me demandais pourquoi elles choisissaient, pour donner naissance à leur enfant, ces précieux moments où mes frères et moi avions tant besoin d’elle. Et pourquoi ces enfants étaient-ils si importants? Pourquoi méritaient-ils que notre maman accoure?
Ne vous méprenez pas, j’aimais et j’admirais ma mère pour sa vaillance et son courage. Je voulais devenir exactement comme elle. Elle était – elle est toujours – une femme dévouée, généreuse, à l’écoute des autres. Une femme douce, toujours prête à nous serrer dans ses bras. Une femme forte aussi, fiable, équilibrée. Elle ne se plaignait pas des horaires difficiles ni des nuits sans sommeil. Elle pratiquait la médecine avec amour et dévouement. C’était sa vocation.
Quand elle était avec nous, elle trouvait l’énergie de jouer et de profiter de chaque instant. Ses besoins à elle n’avaient aucune importance. Vous dire les jeux qu’elle inventait : le bonhomme Sept-Heures, la maman ours, la cachette « bisbaillée », les chasses au trésor. Des heures et des heures de plaisir! On découvrait tant de choses. On lisait aussi. Ah! La lecture avec maman, sa manière unique d’animer les personnages en modulant sa voix. C’était extraordinaire! Elle a fait naître en moi cette incroyable passion pour la lecture et les mots.
Dès l’âge de quatre ans, j’ai appris par cœur un conte de Disney intitulé La soupe au bouton. La manière dont Daisy réussissait à contourner la cupidité et l’avarice de son oncle Picsou me fascinait. Elle était si astucieuse. Alors que Picsou clamait qu’il n’avait rien à manger chez lui, Daisy se mit à cuisiner une soupe au bouton. Elle remplit une grande marmite d’eau et y ajouta un simple bouton. Chaque fois qu’elle avait besoin de quelque chose, elle expliquait à son oncle à quel point la soupe serait bonne si elle pouvait obtenir ce fameux ingrédient. Elle trouvait précisément les mots qu’il fallait pour le faire saliver. Alors Picsou lui faisait découvrir ses merveilles : un garde-manger rempli d’épices, un immense potager, une boucherie digne des plus grands restaurants.
J’a-do-rais cette histoire, qui me mettait l’eau à la bouche – j’étais tellement gourmande. Encore aujourd’hui, le simple fait de vous en parler me remplit de joie. Très tôt, Daisy m’a fait comprendre qu’on peut tout obtenir avec les mots. Plus important encore : elle m’a fait découvrir que les mots ont le pouvoir de déverrouiller le cœur des gens.
Aujourd’hui, mes enfants ont 5 et 7 ans. Être leur maman est l’expérience la plus intense de ma vie parce qu’elle me confronte sans cesse à ce que je suis. C’est également la plus enrichissante, car elle me donne le courage de devenir qui je suis, d’accepter ma vulnérabilité et d’admettre que j’ai des limites.
C’est à la fois difficile et salutaire.
Lynne Pion dit :
Félicitation pour cette démarche et ce projet Judith!
Judith Proulx dit :
Merci Madame Pion! Heureuse de vous compter parmi mes lecteurs!
Judith Proulx dit :
Merci beaucoup Shanie! J’apprécie vraiment que tu prennes le temps de m’écrire.
Danielle Landry dit :
Bravo!!! Tu écris tellement bien…wow!!!…et félicitations pour ce beau projet.
Judith Proulx dit :
Merci beaucoup Danielle!
Julia Bouvet dit :
Inspirant.
Le matin où j’ai lu cet article, mon fils m’a demandé de lire ses deux livres préférés. J’étais sur le point de lui dire « non maman est pressée et doit aller travailler », mais j’ai plutôt lu les livres devant un petit garçon émerveillé par le pouvoir des mots.
Judith Proulx dit :
Trop mignon!
Judith Proulx dit :
Je suis tout à fait d’accord avec toi, Marilise! Merci de me lire!
Francine Michaud dit :
Mes enfants ont 23 et 25 vivent à l’autre bout se la planète par apport à où moi je vis, ils continuellement dans mes pensées, me font travailler ma résilience, le détachement, l’acceptation, l’abnégation par amour dans l’amour. Mère un jour mère toujours.
Bravo pour ce beau témoignage
Judith Proulx dit :
Chère Francine, je ne peux imaginer qu’ils me quitteront un jour tellement ils ont besoin de moi en ce moment. Pourtant, vous avez raison. Et je dois faire en sorte qu’ils deviennent autonomes et libres de penser par eux-mêmes. Quel beau défi! Merci pour votre témoignage!
Judith Proulx dit :
Comme c’est beau, Sylvie : Et si le vide était plein! Merci!
chartier lise dit :
Ah! ma belle Judith,je viens de lire en entier tes écrits ton écriture me charme,comme l’écoute d’une pièce de musique bien équilibrée,une mélodie riche et bien harmonisée.
Quel talent…..
Il m’impressionne ce talent…en plus du courage que tu fais preuve en te livrant …sais tu quoi?
Eh bien tu nous fais du bien…en plus de s,arrêter pour pensée !!!!!!!
merci !
Judith Proulx dit :
Chère Lise, Je suis émue et privilégiée que mes réflexions personnelles voyagent jusqu’au coeur des gens grâce à l’écriture. Merci!
Judith Proulx dit :
Merci, ma chère Mina! De tout coeur!
Être mère est l’aventure d’une vie et la plus belle opportunité de grandir!